T.R.F. Alain Juillet
Grand Inspecteur coordinateur de la réforme
T.R.F François STIFANI
Grande Loge Nationale Française
12 rue Christine de Pisan
75017 PARIS
Paris, le 8 avril 2011
Mon Très Cher Frère François,
Ayant écrit ma lettre du 27 mars pour te proposer une solution de sortie honorable afin d’éviter
l’explosion de la GLNF et répondre aux attentes de la grande majorité des Frères, j’ai le regret de
constater sans autre commentaire polémique que tu as répondu par une simple fin de non recevoir
alors que ce qui se passe est la triste confirmation de ce que je craignais depuis plusieurs mois.
Refusant d’accepter la réalité tu t’obliges à une fuite en avant tout en reportant sur d’autres ta
responsabilité dans la crise actuelle.
Il est temps de regarder les choses en face. Maître LEGRAND a été nommée parce que tu as décidé de
démissionner du poste de Président du Conseil d’administration pour gagner du temps et repousser
l’échéance inéluctable de ton départ. Dans le cadre de son mandat elle est en train de prendre
progressivement la direction de toute la partie profane et associative de l’obédience. Loin de ne
s’intéresser qu’aux comptes de bilan et aux cotisations elle agit : contrôle des comptes du siège, mise
en vente de Wagram, étude de Scribe qui avait été ignorée jusqu’à aujourd’hui. L’audit de la partie
immobilière risque d’avoir des conséquences pénales. Celle de la partie solidarité pourrait aussi créer
des surprises. Sa récente prise de position annonçant sa volonté de présider le conseil de discipline
national face aux sanctions infligées à des Frères est symptomatique. Elle représente et applique les
lois et usages de la République devant lesquelles personne ne peut s’exonérer quels que soient les
motifs invoqués. Le résultat du délibéré en appel de fin juin se chargera sans nul doute de nous le
rappeler.
Tu es Grand Maître selon l’arrêt du TGI de décembre. Depuis, ta démission du Conseil
d’administration pose le problème de la coexistence des deux fonctions qui manque de clarté dans les
statuts comme l’ont montré les récentes plaidoiries en appel. Le doute grandissant qui en résulte et la
perception d’une absence de légitimité expliquent pourquoi certaines Juridictions et plus récemment
une bonne partie des Grand Maîtres Provinciaux ont pris des positions que tu refuses d’admettre alors
qu’elles sont pour le moins tout aussi légitimes que les tiennes. Pour ma part je constate et considère
que par ta seule volonté délibérée c’est maintenant l‘Administrateur ad’hoc qui dirige notre
Obédience. Dans deux mois et demi c’est la Cour qui tranchera.
Contrairement à d’autres qui tout au long de ces derniers mois se sont exprimés tour à tour pour et
contre toi, je fais partie de ceux qui n’ont pas changé d’avis ni voté la prolongation du mandat de 3 à
5 ans tout autant que les modifications successives des statuts visant à te donner un pouvoir absolu. Je
n’ai rien cautionné directement ou pas, et le fait de travailler sur soi avec ses Frères en Loge selon la
Règle de notre Ordre n’a jamais signifié que l’on doive tout accepter. Ce sont ces problèmes
rencontrés par l’obédience qui m’ont amené à réagir et à m’impliquer en écrivant le rapport du comité
de conciliation avant d’accepter ta proposition de prendre en charge le projet de la réforme.
J’ai engagé cette réforme avec enthousiasme, convaincu de sa nécessité dans une obédience, dont les
statuts et le règlement intérieur sont devenus inadaptés aux réalités d’aujourd’hui. En dépit de bonnes
idées comme la mise en place d’un Collège provincial des Vénérables, j’ai constaté avec tristesse
qu’elle prenait un chemin de traverse visant à préserver le système en place à chaque niveau. Tu as
d’ailleurs senti mes réticences lors de ma démission du Conseil des Sages puisque tu as décidé de
transformer ma responsabilité pleine et entière en un rôle de coordinateur. Je me suis toujours
impliqué dans la recherche de solutions constructives comme dans la préparation de ton entrevue avec
notre Frère Claude SEILER en mai 2010, mon action pour la réintégration de notre Frère Jean-Paul
PEREZ, voire mes entretiens réguliers avec FMR et les Myosotis depuis juillet 2010 pour te faire
entendre la voix de ton opposition.
L’immense majorité des Frères ne veut pas plus d’une révolution fédérative que d’une concentration
excessive des pouvoirs dans les mains d’un seul et de charges assumées trop longtemps génératrices
d’excès hiérarchiques et de dérives multiples. La réforme doit simplement nous faire revenir aux
fondamentaux pratiquées par les autres Grandes Loges Régulières et mettre en place des
contrepouvoirs pour ne plus subir la loi d’un petit groupe qui aura sans doute un jour des comptes à
rendre à notre justice. Chaque instant qui passe montre que tu confonds le pouvoir arbitraire d’un chef
de clan avec celui fraternel d’un Grand Maître d’une obédience maçonnique.
La réunion des Grands Maîtres Provinciaux de la région parisienne de mercredi dernier en a été une
nouvelle démonstration. J’espère que la réunion des Grands Maîtres Provinciaux du 15 avril, dans
laquelle des équipes pilotées directement par toi et Jean Pierre ROLLET feront connaître leurs
conclusions, montrera que je me suis trompé ; mais ta volonté de passage en force et l’orientation des
propositions aux objectifs discutables me fait craindre le pire d’autant qu’il n’y aura guère de risque de
contradiction.
Dussè-je me répéter, mais pour réussir notre évolution nous devons être ouverts à toutes les
propositions dès lors qu’elles respectent la régularité, prêts à nous adapter aux attentes légitimes des
Frères et nous nous devrons, pour notre sauvegarde à tous dans le futur, d’y inclure une procédure
exceptionnelle de révocation du Grand Maître.
La situation se dégrade chaque semaine. 10 Grands Maîtres Provinciaux, soit le tiers d’entre eux
viennent d’annoncer qu’ils ne reconnaissent plus ton autorité et se placent sous celle de Maître
Legrand, d’autres vont suivre en dépit des sanctions et des menaces. Les nominations précipitées de
remplaçants ne changeront rien sur le fond, et loin de rassembler ce qui est épars n’auront pour finalité
que de stigmatiser les dissensions au sein des Provinces et d’ajouter plus encore au désarroi de tous.
Que tu le veuilles ou non tu ne pourras faire descendre de charge par mesure de rétorsion et remplacer
tous les Grands Officiers Nationaux ou Provinciaux qui ne te font plus confiance. Il est grand temps
que tu oublies ton intérêt personnel et la défense de ceux que tu protèges pour ne plus te préoccuper
que de l’intérêt réel de la GLNF et de ses Frères.
Devant des propositions que j’ai voulu constructives et ouvertes pour sortir de la crise, certains ont été
jusqu’à dire que je voulais substituer à une maçonnerie affairiste une maçonnerie d’Etat imaginée par
un haut fonctionnaire pour aider les politiques. C’est méconnaître la réalité d’aujourd’hui et la façon
dont les 13 lettres de la GLNF ont été archivées à la Présidence de la République depuis le début de
ton mandat. Loin de demander la Légion d’Honneur pour soi même au titre de la Grande Maîtrise,
nous devons revenir à ce qui fait notre force : notre indépendance d’esprit par rapport aux pressions
politiques ou économiques venues d’ailleurs.
Face à ma demande de nomination d’un Député Grand Maître tu m’avais dit qu’il devait avoir été
préalablement Grand Maître Provincial. J’ai cherché en vain dans nos statuts et règlement intérieur
ainsi que dans les constitutions d’ANDERSON l’existence de cette règle, avant de découvrir que nos
TRF André ROUX et Claude CHARBONNIAUD ne l’avaient pas été. Dans l’intérêt de la GLNF, audelà
des réactions qu’elle t’inspire, tu aurais dû mieux regarder ma proposition qui avait le mérite de
t’assurer une sortie honorable tout en préservant l’essentiel comme avait su le faire le Très Respectable
Grand Maitre Pierre CHERET, élu en 1947 et démissionné en 1958.
Ton erreur la plus grave vient de ce que tu penses que des frères comme moi te combattent
personnellement alors que notre seul but est de défendre notre obédience aujourd’hui en miettes. Pour
relancer cette dernière sans exclusive, dans le respect des opinions de chacun, saches que je fais partie
de ceux qui sont convaincus que, comme au GODF il y à quelques années, nous ne pouvons plus nous
en sortir que par un Comité de Coordination et de Sauvegarde de la GLNF dont je propose la création
à Me LEGRAND ainsi qu’à toi-même. Ce Comité que je suis prêt à présider sera composé d’une
quinzaine de Frères reconnus représentant toutes les sensibilités de la Grande Loge Nationale
Française : les blogs Myosotis, FMR, les principales Juridictions, les Grands Maîtres Provinciaux et
tes représentants si tant est que tu puisses accepter qu’ils y participent. Les Frères qui composeront ce
Comité auront pour mission de trouver un consensus sur l’évolution nécessaire et de veiller à ce que
l’Obédience sanctionne fermement ceux qui ont commis des actes délictueux et rouvre les portes à
tous les autres exclus sans réelle raison maçonnique. C’est cette équipe qui devra remettre en ordre de
marche l’obédience, faire voter les principales modifications de statuts avant de lancer la procédure
d’élection d’un nouveau Grand Maître dans les meilleurs délais sachant que si tu ne démissionnes pas
il est maintenant quasiment certain que tu seras révoqué à la prochaine assemblée générale.
Pour conclure je ne doute pas un instant que cette nouvelle proposition me vaudra encore beaucoup
d’attaques de ceux qui te sont proches comme de tes plus farouches opposants, tous me jugeant selon
leurs propres critères. C’est leur droit le plus strict bien que je déplore la violence des propos
s’appuyant sur des affirmations sans preuves. Je regrette que tu ais ouvert depuis plus d’un an une
boite de Pandore qui ne se refermera plus ; mais mon engagement maçonnique de tolérance et de
fraternité m’amène à écouter tous les messages pour détecter les vraies questions sous les fausses
interprétations.
Contrairement aux ambitions que me prêtent ceux qui ne me connaissent pas, mon seul objectif est que
la GLNF sorte au plus vite et le moins mal possible de cette crise d’une ampleur inégalée. Que chacun
d’entre nous respecte l’article 12 de la règle en douze points qui stipule que nous nous devons aide et
protection fraternelle et qu’il nous faut conserver en toute circonstance le calme et l’équilibre
indispensable à une parfaite maîtrise de soi.
Je te prie de croire, Mon Très cher Frère François, en mes sentiments maçonniques et fraternels.